
À Hanoï, l'avenir des scooters à essence menacé : millions de deux-roues en sursis

Les rues de Hanoï, célèbres pour leurs milliers de scooters à essence, pourraient connaître un profond bouleversement d'ici 2026. En réponse à la pollution de l'air qui affecte dramatiquement la qualité de vie des habitants, le gouvernement vietnamien a décidé d'interdire la circulation de ces deux-roues alimentés par des carburants fossiles dans le centre historique de la capitale. Cette mesure radicale, qui touche une communauté déjà bien ancrée dans l'utilisation des scooters, soulève de nombreuses interrogations sur les défis économiques, sociaux et environnementaux que représentent cette transition vers une mobilité plus durable. Les habitants de Hanoï, dont beaucoup se déplacent quotidiennement à scooter pour des raisons pratiques et économiques, se trouvent face à un tournant qui pourrait bouleverser leur mode de vie quotidien.
Les enjeux de la pollution à Hanoï et l'impact des scooters à essence
Hanoï, une des métropoles les plus dynamiques du Vietnam, est aussi l'une des plus polluées au monde. Les conditions atmosphériques sont souvent alarmantes, avec des niveaux de particules fines (PM2.5) dépassant les normes de sécurité. Selon des études récentes, près de 70 000 décès par an au Vietnam sont attribués à la pollution de l'air, un fléau de santé publique qui nécessite des actions concrètes. Parmi les principales sources de cette pollution, les émissions des plus de sept millions de deux-roues motorisés en circulation sont identifiées comme un facteur majeur, contribuant aux nuages de fumée et à la dégradation de l'environnement.
- Les motos représentent environ 60% des émissions de monoxyde de carbone dans la ville.
- Le ministère vietnamien de l'Agriculture signale que près de la moitié de la pollution de l'air provient des véhicules à essence.
- Les embouteillages exacerbent la situation, fomenter des trajets plus longs et une consommation de carburant accrue.
La concentration de scooters, souvent anciens et peu économes en carburant, est ingérable dans des zones comme le centre-ville où la circulation est dense. De fait, de nombreuses familles, comme celle de Dang Thuy Hanh, ressentent la pression de devoir changer leurs habitudes. "Nous avons besoin de scooters non seulement pour nos déplacements, mais pour notre quotidien. Nous n'avons pas le budget pour acheter des électriques", déplore-t-elle. La décision du gouvernement, bien que salutaire d'un point de vue environnemental, soulève la question de l'accessibilité et de l'adéquation des nouvelles solutions de transport.
La directive d'interdiction et son impact sur les habitants
Le Premier ministre a publié une directive en juillet 2025, programmant l'interdiction des scooters à essence dans le centre d'Hanoï à partir du 1er juillet 2026. Cela concerne une zone emblématique de la ville, s'étendant sur plus de 30 kilomètres carrés, englobant des lieux touristiques prisés autour des lacs de l'Ouest et Hoan Kiem. Ce plan, présenté comme une solution durable pour réduire la pollution, doit progressivement s'étendre pour inclure les voitures à essence à partir de 2028. Alors que certains voient cela comme une avancée nécessaire, beaucoup de citoyens se sentent démunis devant une telle transition.
Un tableau illustrant les types de véhicules concernés pourrait bien montrer qui sont les utilisateurs les plus impactés par ce changement :
Type de véhicule | Quantité | Pourcentage de la circulation |
---|---|---|
Scooters à essence | 7 millions | 60% |
Voitures à essence | 1 million | 20% |
Scooters électriques | 250,000 | 5% |
Autres véhicules | 2 millions | 15% |
Les préoccupations quant à la faisabilité de cette directive sont nombreuses. La population, composée majoritairement de jeunes et de travailleurs à revenu modeste, est depuis longtemps habituée à l'utilisation de scooters pour leur coût abordable et leur flexibilité. En revanche, les motos électriques, bien qu'émergentes, ne sont pas encore à la portée de tous. "Nous ne sommes pas prêts", affirme Tran Van Tan, un livreur qui parcourt chaque jour de longues distances sur son scooter. Les questions logistiques d’infrastructures, de recharges et de coût freinent l'enthousiasme de nombreux habitants.
Les alternatives électriques face à la transition
Face à l'interdiction imminente, le marché des scooters électriques connaît un essor significatif. Fabriqués par des marques comme Honda, Yamaha, et BMW Motorrad, ces deux-roues électriques semblent constituer une réponse à la directive gouvernementale. Parmi eux, le modèle BMW CE 04, qui promet une grande autonomie et des performances adaptées aux besoins urbains, a fait son entrée sur le marché vietnamien. Les autorités espèrent que cette transition vers les véhicules électriques sera facilitée par des aides financières, mais les préoccupations financières demeurent un frein.
Les défis économiques de l’adoption des scooters électriques
Le coût d'un scooter électrique reste un obstacle majeur pour de nombreux habitants d'Hanoï. Les modèles disponibles sur le marché, bien que de plus en plus variés, peuvent atteindre jusqu'à 80 millions de dongs (environ 3 200 euros).{"n"} En revanche, un scooter à essence peut être acquis pour moins de 15 millions de dongs (600 euros). Cette différence est problématique, surtout pour les familles à faible revenu qui utilisent leurs scooters comme moyen principal de transport.
- Subvention gouvernementale de 3 millions de dongs pour aider à la transition.
- Réseau de stations de recharge en développement, mais insuffisant.
- Batteries à recharge rapide encore trop peu disponibles.
La contradiction entre la volonté politique et la réalité quotidienne des habitants est frappante. Le passage à l'électrique exige des efforts supplémentaires pour éduquer les utilisateurs à propos de ces nouveaux systèmes de transport, mais aussi de politiques adaptatives qui répondent aux besoins spécifiques des différentes couches sociales. Un dialogue ouvert entre le gouvernement, les entreprises et les citoyens est essentiel pour que cette transition se fasse en douceur.
Les réactions diverses face à la mesure du gouvernement
Les opinions face à cette stratégie gouvernementale varient grandement. D'une part, certains applaudissent la volonté de rendre Hanoï plus verte et modernisée. De l'autre, des voix s'élèvent pour dénoncer une mesure perçue comme brutale et précipitée. De nombreux habitants craignent que cela n'engendre un retour à l'usage des voitures à essence, aggravant paradoxalement le problème de pollution. En effet, la réalité de l'infrastructure des transports publics à Hanoï reste encore limitée, avec seulement quelques lignes de métro opérationnelles.
Une question de viabilité du transport public
Une des préoccupations majeures à ce stade concerne le système de transport public, souvent jugé inadéquat. Les lignes de métro, bien que prometteuses, ne desservent qu'une partie de la ville. De plus, la fréquence et l'efficacité des bus restent perfectibles. Les habitants qui se déplacent pour travailler ou étudier s'interrogent sur la viabilité de ce modèle alternatif, qui doit encore prouver sa capacité à prendre en charge l'énorme population de la ville. Cela soulève aussi un autre enjeu : les incitations à l'utilisation de transports publics, d'autant que de nombreux usagers ressemblent déjà à des étudiants, des travailleurs précaires, qui n'ont pas les moyens de s'offrir un scooter électrique ou une voiture.
- Amélioration nécessaire des infrastructures de transports en commun.
- Incitations financières à l'utilisation des transports publics.
- Éducation sur les avantages des véhicules électriques.
Alors que de jeunes entreprises vietnamiennes, comme VinFast, cherchent à innover dans le secteur électrique, la question de l'adoption à grande échelle reste ouverte. Une transition qui se veut écologique, mais demandera une approche mesurée où le bien-être des citoyens prime avant tout.
Les perspectives d'avenir pour Hanoï et ses habitants
La décision du gouvernement de bannir les scooters à essence à Hanoï pourrait indiquer un changement fondamental dans le paysage urbain de la ville. Grâce à cette initiative, les autorités visent un avenir plus durable et une amélioration de la qualité de l'air. Cependant, cela ne peut se réaliser sans une planification rigoureuse et un engagement réel à répondre aux préoccupations de la population. L'adoption de modèles électriques par des marques comme Piaggio, Kymco, Vespa, et d'autres pourrait réduire la dépendance aux scooters à essence, mais encore faut-il que les habitants aient accès à ces nouveaux véhicules adaptés à leur mode de vie.
Les initiatives pour soutenir la transition
Des efforts doivent être déployés pour faciliter cette transition, non seulement par des stratégies financières mais aussi en rendant le concept de deux-roues électriques attractif et accessible. _Uber Eats_, par exemple, envisage de transformer ses livreurs afin de leur fournir des scooters électriques. Ce changement pourrait permettre aux utilisateurs de véritables gammes de véhicules adaptés tout en n’oubliant pas l'importance de la formation à la conduite de ces nouveaux modèles.
- Sensibilisation sur les avantages écologiques des véhicules électriques.
- Renforcer le soutien gouvernemental aux achats de scooters électriques.
- Collaboration avec des entreprises de livraison pour promouvoir l'électrique.
Alors que Hanoï se prépare à entrer dans cette nouvelle ère, le focus va être mis sur la collaboration entre les différents acteurs. Les autorités doivent s'assurer que le passage aux solutions de transport plus écologiques se fasse de manière juste et équitable, sans laisser de côté une partie de la population. Les défis sont conséquents, mais avec une volonté collective, ils pourraient être surmontés.
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